Cliché N° 3 : travailler + pour gagner +

Publié le par Félix M.

«  Les 35 heures, quel archaïïïsme ! Le travail, ça ne se partage pas comme un gâteau ! Le travail crée de la croissance, la croissance crée de l’emploi ! »

 

 -> Ritournelle du sarkozysme offensif et éternellement revanchard quant aux années Jospin, cette  propagande  est fallacieuse à plusieurs titres :

 

4268391779_84d7231831.jpgOn travaille pour vivre, non l'inverse

La manière qu’a Sarkozy de présenter les 35 heures comme une incongruité va à l’encontre d’une Histoire du progrès social, au cours de laquelle la loi a permise de libérer du temps de vie privée en baissant petit à petit le temps de travail. Le fait qu’on remette en cause ce sens de l’Histoire à l’heure où on est capables de produire plus que jamais avec moins de travail, est tristement révélateur de l’état actuel de la lutte des classes, très favorable au camp des dominants : les gains de productivité ne serviraient donc qu’à enrichir davantage le capital, et non à améliorer les conditions d’existence de ceux qui apportent le facteur travail...

 

A défaut de pouvoir partager le travail : produire pour produire ?! 4425848138_b37f31fb26.jpg

Le triomphe du slogan « travailler + pour gagner + » aux dernières présidentielles, montre l’avancée des présupposés productivistes dans les cerveaux disponibles. Ce slogan  véhicule l’idée qu’il n’y a pas de société mais un empilement  d’individus. Dans le règne de l’impuissance publique, tout se jouerait au niveau des individus ayant pour seule perspective d'augmenter leur production pour accroitre leur revenu. Alors qu'il y a du chômage, on propose à ceux qui travaillent déjà de travailler davantage, et on s'en remet à l'hypothétique augmentation générale de la production pour créer des emplois... Cette idée, en renvoyant chaque travailleur à une solution individuelle, permet de passer à la trappe toutes revendications de classe se situant sur le terrain de la répartition des richesses déjà existantes. Mais surtout, à l’heure où on parle d’écologie, l’impuissance du politique empêcherait d’affecter la production présente aux travailleurs à occuper, laissant l’augmentation de la production comme  seul moyen de toDSC00331utes politiques économiques. La seule marge de manoeuvre face au chomâge se situerait  dans l’idée de produire davantage pour occuper celui qui produira (Pourtant, le travail a cela de commun avec le gâteau, qu’il consiste notamment en la transformation de ressources qui ne sont pas infinies.) Sarkozy n'a fait que reprendre la vieille lubie de la croissance à tout prix, en la rendant encore plus caricaturale. La perte du contrôle de l'économie par les Hommes amène donc à, non-plus produire pour répondre aux besoins de la consommation, mais consommer pour répondre au besoin de produire...

 

Slogan mauvais par essence, par dessus le marché inefficace dans la pratique

DSC00961En plus d’être critiquable dans la vision de la société  qu’il véhicule, le « travailler + pour gagner + » ne fonctionne même pas, comme on peut le constater depuis 2007. Le gouvernement a beau encourager les heures supplémentaires, ce n’est pas l’employé qui choisit le niveau de production : on a beau expliquer au travailleur qu’il n’a qu’à faire deux gâteaux plutôt qu’un, ce n’est pas pour autant qu’il y aura quelqu'un pour acheter le deuxième gâteau ensuite. Cette fausse solution a révélé toute sa vacuité en ne résorbant en rien les conséquences de la crise du capitalisme libéral. Constatons par ailleurs que, là encore, les faits donnent tort aux productivistes, même avec leurs propres critères : la politique des 35 heures, en ne mettant pas en avant la croissance comme finalité en tant que telle, a abouti dans les faits à de meilleurs résultats que le productivisme de courte vue, y compris en terme de production de richesses…

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Prétendre « travailler + pour gagner + », c'était se croire encore aux trente glorieuses, et ça ne pouvait donc pas marcher: évidemment que, dans un pays développé, on n'a pas de marges de croissance économiques telles que permettant de travailler individuellement davantage tout en créant par ailleurs des emplois supplémentaires en nombre équivalents. D'ailleurs, même pendant les périodes de forte expension économique, on n'avait jamais pris le chemin d'un productivisme aussi caricatural. Ce slogan facile a donc été un contresens historique, et les français le paient aujourd'hui.

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